Ivry-sur-Seine, le 29 juin 2019. Le « référendum » local sur le projet de reconstruction de l’incinérateur d’Ivry-Paris XIII, le plus ancien et le plus grand d’Europe, s’est déroulé ce 29 juin. Le « contre » l’a emporté à plus de 91%.
Ce « référendum » rebaptisé « consultation citoyenne » dont l’organisation a été reprise il y a tout juste 3 jours par l’association Collectif 3R, après que le maire d’Ivry-sur-Seine y ait renoncé menacé d’inéligibilité suite à un jugement du Tribunal administratif de Melun, a mobilisé 570 ivryen·ne·s qui ont bravé la canicule pour se déplacer dans l’un des 6 bureaux de vote tenus au pied levé par les bénévoles associatifs, avec le concours d’élus. Le vote électronique – disponible du 17 mai au 24 juin – faisait également l’objet d’un recours de l’Etat, annulant de fait la contribution de 137 votants.
Pourquoi un tel acharnement de l’Etat contre une consultation citoyenne non inscrite dans les procédures réglementaires et donc à l’effet surtout symbolique et politique ?
L’opposition au projet est forte, constante et constamment minimisée et balayée par le Syctom : en 2009, le débat public organisé par la Commission nationale du débat public (CNDP) avait mobilisé près de 1 000 participants aux réunions publiques et 30 000 connexions sur le site web dédié. La CNDP avait vivement déploré le fait que le projet présenté au public soit déjà « ficelé ». Le Plan Bom, alternative au projet présentée par le Collectif 3R et Zero Waste France, n’a jamais été sérieusement étudié par le Syctom. En 2018, l’enquête publique sur le projet avait recueilli plus de 2000 observations dans le registre, ce qui est énorme pour ce type d’enquête. Ces observations étaient à 99% défavorables au projet, ce qui n’a pas empêché la commission d’enquête de rendre un avis favorable et sans réserve au projet, sans même prendre en compte les études techniques des associations.
Aujourd’hui, pour annuler une consultation citoyenne décidée par le conseil municipal d’Ivry-sur-Seine, l’Etat brandit le résultat de cette enquête publique comme preuve d’une concertation aboutie, alors qu’elle manifeste au contraire un déni de démocratie, bien éloigné de pratiques qui pourraient restaurer la confiance des citoyens dans les institutions.
Et maintenant ?
Le projet du Syctom prévoit 2 usines :
- un nouvel incinérateur (dit UVE pour unité de valorisation énergétique), technologie coûteuse, qui contribue au réchauffement climatique et à la pollution de l’air avec des incidents fréquents, et dont la justification de l’utilité sociale au regard de la production de chaleur convainc de moins en moins ;
- une UVO (unité de valorisation organique) qui bat de l’aile à cause notamment de sa dangerosité et de sa non-pertinence dans le contexte de l’extension des consignes de tri et de l’obligation de la collecte sélective des biodéchets qui entrera en vigueur en 2025.
Ce référendum intervient alors que les travaux de l’UVE ont démarré et que 3 recours juridiques portés par les associations Collectif 3R et Zero Waste France sont en attente de jugement. Ces recours visent l’annulation de décisions des services de l’Etat favorables au projet du Syctom (déclaration du projet comme Projet d’Intérêt Général en 2015, permis de construire et autorisation d’exploiter délivrés en 2018) pourtant contraire aux dispositions réglementaires, notamment de la loi de transition énergétique.
Les élu·e·s à la mairie d’Ivry quasi unanimes avaient invité les habitants à voter « contre » lors du « référendum« . La Mission d’Information et d’Evaluation (MIE) des élu.es d’Ivry, a publié en 2019 un rapport préconisant notamment une alternative au projet UVO par la réalisation d’une Unité de Valorisation Matière (UVM) qui serait un centre de tri multifilières.
Le Collectif 3R demande au Syctom de suspendre son projet et de réexaminer avec les collectivités du bassin versant, la mairie d’Ivry et les associations l’ensemble du projet UVE + UVO de reconstruction de l’usine d’incinération d’Ivry-Paris XIII. Nous interpellons tout particulièrement la ville de Paris qui doit cesser son double discours, à la fois chantre du combat contre le changement climatique et la pollution, tout en continuant à soutenir sur le terrain des projets du siècle dernier, véritables usines à polluants toxiques et à CO2.