Depuis la réunion houleuse que les élus du Syctom ont eu à affronter le 5 juillet 2016 le Collectif 3R n’est pas resté inactif.
La pétition
En association avec Zero Waste France nous avons lancé une pétition, pour dire non à ce projet démesuré de moins en moins crédible qui ne respecte pas la Loi de Transition Énergétique pour la Croissance Verte de 2015 (LTECV) , et demander aux élus la mise en place du Plan B’OM (Plan Baisse des Ordures Ménagères sur www.planbom.org) qui, loin d’être utopique, ne vise qu’à atteindre en 2023 les performances, déjà en dessous de la moyenne nationale, de villes comme Nantes ou Lyon aujourd’hui. Nous vous invitons à la signer et à la relayer largement auprès de vos amis, sur vos réseaux sociaux, et auprès des associations auxquelles vous participez : http://frama.link/StopIncinerateur
Le recours juridique contre le P.I.G.
Le Collectif 3R a également engagé un recours juridique auprès du tribunal administratif contre la qualification de Projet d’Intérêt Général (PIG) accordée par la préfecture du Val-de-Marne au projet du Syctom.
Le Collectif 3R argumente son recours sur le choix fait par le Syctom d’opter pour un PIG afin de mettre en compatibilité le Plan Local d’Urbanisme (PLU) d’Ivry-sur-Seine avec le projet litigieux, dans le but précisément de se soustraire à l’obligation d’organiser une enquête publique environnementale, nécessaire dès lors qu’un projet de la sorte n’est pas qualifié d’intérêt général.
Le Collectif 3R dénonce également dans son recours l’absence de présentation par le Syctom d’une alternative à son projet. Les études effectuées par le Syctom pour définir le dimensionnement de l’usine d’incinération datent de 2004 et prévoyaient une augmentation du tonnage des déchets alors que ce tonnage va décroissant depuis l’année 2000. De plus ces études ne prennent nullement en compte la diminution à venir des déchets rendue inéluctable par les mesures inscrites dans la LTECV . A l’inverse le Plan B’OM prend en compte de manière réaliste l’application de la loi et le rattrapage par les communes du Syctom d’une partie du retard de la région parisienne en matière de réduction des déchets et de tri/recyclage.
Les enseignements de la concertation
Concernant la 3ème concertation du printemps 2016 qui a abouti à la réunion publique du 5 juillet dernier, le garant a remis son rapport que vous pouvez trouver sur https://www.debatpublic.fr/projet-centre-valorisation-biologique-energetique-dechets-a-ivry-paris-xiii. La Commission Nationale du Débat Public en a conclu qu’il n’y avait pas lieu de procéder à un nouveau Débat public. Le Syctom a donc le champ libre pour faire avancer son projet et faire voter par les élus la première tranche de travaux concernant la reconstruction de l’usine d’incinération.
Si cette conclusion est décevante, la concertation a quand même permis de clarifier certains points techniques du projet. Tout d’abord nous sommes avertis que contrairement aux déclarations faites par la mairie, à la suite du vœu du conseil municipal qui s’y opposait, il y aura bien une usine similaire à une usine de Tri Mécano Biologique (TMB) de 365 000 tonnes sur le site. La partie méthanisation n’est pas abandonnée, elle est déplacée ! La partie fermentescible des déchets triés à partir de la poubelle en mélange dans les cylindres (ou trommels) serait extraite au bout de 7 jours environ du site d’Ivry-Paris XIII pour être transportée vers les stations d’épuration d’Achères et de Valenton afin de produire du gaz par décomposition. Le résidu ou digestat serait ensuite séché et mis en décharge ou incinéré.
Le Syctom nomme ce procédé « tri-préparation » pour atténuer la très mauvaise réputation des usines de TMB (voir note 1). Il n’en demeure pas moins que nous aurons bien une usine (probablement la plus grosse d’Europe) qui triera des déchets en mélange mécaniquement en plein cœur d’une zone urbaine dense, avec un début de fermentation des fermentescibles, et avec tous les aléas et les dysfonctionnements propres à ce genre d’installation1. Nous avons demandé à visiter une unité du même type, mais il n’en existe pas en France, nous aurons donc droit à une expérimentation dont on nous assure de toute la sécurité nécessaire…
La finalité reste la même, c’est « tout pour l’incinération ». il s’agit d’extraire des ordures en mélange, et de sécher des « combustibles solides de récupération » (CSR) – essentiellement plastiques et cartons -, afin de réduire le tonnage à incinérer et augmenter son pouvoir calorifique. La logique du Syctom n’a pas varié depuis le lancement de ce projet, c’est bien en réduisant artificiellement le poids des déchets et non en améliorant la prévention et le tri que la capacité de l’usine est réduite de moitié. La capacité à polluer reste la même.
L’autre enseignement important que nous avons retiré de cette concertation concerne ce que le Syctom appelle la réversibilité d’un des deux fours. Bien que le Syctom base ses calculs sur la poursuite d’une performance médiocre en matière de tri et de recyclage, il prévoit néanmoins que l’un des deux fours sera inutile dans un temps indéterminé. Son scénario est donc de transformer ce four en immense chaudière (175 000 tonnes), afin d’alimenter le réseau de chaleur du chauffage urbain. Ce four brûlerait de la biomasse, c’est à dire du bois. Mais comme évidemment il n’existe pas 175 000 tonnes de déchets de bois, le four pourrait être alimenté par des granules de bois importés du Canada qui en produit beaucoup. C’est un scandale dont les élus n’ont probablement pas encore bien pris la mesure car non seulement il n’est pas de la compétence du Syctom de produire de la chaleur autrement qu’avec des déchets, mais endetter les citoyens pour alimenter un four gigantesque dégageant du CO2 avec des produits importés d’un autre continent est doublement irresponsable et totalement contradictoire avec la Loi de Transition Energétique et les engagements pris par le gouvernement lors de la COP21.
Une autre incohérence nous est apparue dans ce projet. Le Syctom claironne sans cesse qu’il veut stopper le recours à la mise en décharge, sur ce point nous partageons son avis, et le plan B’OM prend bien en compte les tonnages actuellement mis en décharge en Seine-et-Marne, dont le flux sera arrêté. Mais étant donné que la diminution de moitié de la capacité de l’usine d’Ivry-Paris-XIII n’est obtenue qu’en asséchant les déchets en vrac de nos poubelles, il y a une contradiction dans le phasage du projet. En effet l’unité d’incinération est prévue pour être opérationnelle en 2023 alors que l’unité de TMB ne le sera qu’en 2027. Comme le scénario du Syctom ne prévoit qu’une baisse marginale des tonnages à traiter cela veut dire que 350 000 tonnes d’OMR par an seront mises en décharge pendant 4 ans. Décidément ce projet est vraiment pris à l’envers et nous n’arrivons pas à comprendre l’entêtement des élus à le soutenir coûte que coûte.
Au contraire du projet du Syctom qui table sur la pérennité des mauvaises performances de prévention et de tri/recyclage sur son territoire, le plan B’OM montre qu’en investissant 200 millions d’euros et 700 emplois dans une politique modérée et éprouvée de rattrapage du retard de la région parisienne en matière de gestion des déchets, l’incinérateur d’Ivry-Paris XIII n’aura pas besoin d’être reconstruit et il n’y aura plus de déchets ménagers mis en décharge en Seine-et-Marne. Le plan B’OM ne prétend pas rattraper tout le retard accumulé, mais atteindre un taux de recyclage de 35% en 2023, en partant de l’analyse de la poubelle de nos collectivités, et en appliquant des solutions spécifiques à un territoire qui comprend beaucoup d’entreprises et de bureaux et qui génère donc des masses de déchets particuliers.
Nous pensons qu’il est encore temps de stopper cette gabegie et nous avons envoyé un courrier aux 68 élus siégeant au conseil syndical du Syctom ainsi qu’à leurs suppléants afin de les rencontrer pour les convaincre de ne pas voter la prochaine tranche de travaux sans avoir demandé une étude sur les effets attendus de la Loi de Transition Energétique sur les tonnages que le Syctom aura à traiter en 2023 et 2027. Nous demandons également une étude permettant de confronter les chiffres du scénario du Syctom et ceux du plan B’OM, qui n’ont jamais été discutés lors de la concertation 2016.
Note 1 – Ces usines sont sujettes à des incendies spectaculaires : Fos-sur-Mer en novembre 2013, Bayonne le 15 septembre dernier, qui peuvent être catastrophiques s’ils atteignent la zone de stockage du gaz. Elles génèrent d’autre part des odeurs pestilentielles à plusieurs kms à la ronde, en cas de dysfonctionnements (nombreux) qui ont obligé par exemple l’usine d’Angers à fermer il y a un an, après 3 ans seulement de fonctionnement, l’exploitant n’arrivant pas à gérer le problème d’odeurs, qui mettait aussi en danger la santé des ouvriers à l’intérieur de l’usine.
Article à retrouver dans la lettre d’info n°6.
Tenez bon !
L’économie circulaire exige autant de courage que de lucidité !
On ne peut laisser les seuls gestionnaires décider !
Comment faire blocage pour amener à changer en profondeur la loie sur les déchet et faire comme à San Francisco ?
Il nous faut peut être retenir des parlementaires en otage ? Jusuà ce qu’ils s’engagent à faire aboutir une loi sur les 3 R
au lieu d’un grand I P = incinération +Pollution !
Philippe VACHETTE