Communiqué de presse
La poubelle qui vaut deux milliards
Ivry-sur-Seine, le 9 mars 2015
Le Collectif 3R s’inquiète du manque de transparence du Syctom dans la gestion du dossier de reconstruction de l’usine de traitement des déchets d’Ivry-Paris XIII.
Alors que les élus ont voté le 17 octobre 2014 l’attribution du marché de conception et d’exploitation d’une usine d’incinération et d’une usine de TMB-méthanisation à Ivry-Paris XIII pour deux milliards d’euros à un groupement conduit par une filière de Suez-Environnement, il a fallu attendre le 2 février pour que le contrat soit signé.
Depuis cette date le Collectif 3R demande régulièrement à consulter les éléments du contrat, sans succès. Y aurait-il quelque chose à cacher ? A quoi les 65 élus du SYCTOM qui ont voté ce marché public nous ont-ils engagés ?
A ce jour, peu de personnes ont pu accéder à la totalité du contrat, à l’exception des 5 élus de la Commission d’appels d’offres du Syctom. Les autres élus étaient invités à demander un rendez-vous pour consulter le dossier dans les bureaux du Syctom, avant le vote du 17 octobre 2014. Mais combien l’ont fait ?
Y-a-t-il eu concurrence ou entente dans l’alternance entre les deux grands protagonistes du secteur « Déchets », Suez et Veolia ? Pourquoi un engagement d’exploitation de 23 ans ? Quelles compensations en cas de rupture du contrat ?
Et pourquoi le projet d’Ivry-Paris XIII est-il si coûteux ? Qu’y a-t-il d’extraordinaire dans ce projet qui justifie un coût aussi exorbitant au regard des autres installations de traitement des déchets ? En ces temps de vaches maigres pour les collectivités, les communes du Syctom s’endettent pour des années, et verront leur taxe d’enlèvement des ordures ménagères augmenter de manière continue pour faire face à ces investissements. Rappelons que le projet d’aéroport de Notre Dame des Landes, contesté à l’échelle nationale, ne prévoit qu’un investissement de 561 millions d’euros.
Les politiques publiques européennes et nationales insistent depuis 2008 sur la nécessaire baisse des tonnages destinés à l’enfouissement et à l’incinération car ce sont des modes de traitement polluants pour la santé et l’environnement et consommateurs de ressources. Est-il encore opportun en 2014 de reconstruire à grands frais pour 40-50 ans un nouvel incinérateur dont on sait que dans 10 ans il sera probablement en sur-capacité, comme tous les autres incinérateurs d’Ile de France ? Un moratoire sur cette reconstruction, et la remise à plat du projet permettrait aujourd’hui de fermer progressivement le plus vieil incinérateur de la Région parisienne, et d’améliorer la qualité de l’air pour les Parisiens et la proche banlieue. La mutualisation des installations sur l’Ile de France, ainsi que la remise à neuf par le Syctom entre 2010 et 2012 des 2 fours d’Ivry-Paris XIII, rendent cette hypothèse plausible.
Alors que le ministère de l’Ecologie encourage aujourd’hui en France des stratégies « zéro gaspillage, zéro déchet », le Syctom ne devrait-il pas consacrer la majeure partie de ses investissements à la réduction des déchets, au tri à la source et notamment à la collecte sélective des bio-déchets, et à leur valorisation, plutôt que de regarder vers le passé ? Le Syctom consacre à travers son Plan Métropole Prévention Déchets 0,33% de son budget de 473 millions d’euros à la réduction des déchets. Et encore cette somme n’est-elle dépensée que pour 40% !
Le Collectif 3R demande que les communes utilisent l’argent public pour se conformer à la loi et qu’elles atteignent les objectifs de réduction des déchets fixés par la loi Grenelle II, c’est à dire 45% de tri-recyclage en 2019 (le Syctom en est très loin avec ses 15% en 2014) ; qu’elles mettent en place une tarification incitative, pour faire en sorte d’y parvenir ; et qu’elles pratiquent la collecte à la source des bio-déchets des « gros producteurs » inscrite dans la loi et en application depuis 2012.
Le Collectif 3R invite la presse à le rejoindre devant le siège du Syctom, 35 boulevard de Sébastopol, à Paris, le mercredi 11 mars à 14h30 pour exiger l’accès à l’ensemble du contrat signé au nom des citoyens.